Qu’est-ce qui vous a fait vous lever ce matin ?
- Est-ce simplement parce que le réveil a sonné et qu’il fallait donc se lever ?
- Est-ce parce que vous voulez montrer le bon exemple à vos enfants en étant un adulte professionnel, ponctuel et impliqué dans son travail ?
- Est-ce parce qu’aujourd’hui, vous avez un RDV important et que vous avez une tonne de choses à faire avant pour être totalement prêt ?
- Est-ce parce que vous êtes content de vous lever chaque matin pour aller travailler ?
- Ou encore parce que vous êtes impatient d’attaquer cette nouvelle journée et découvrir ce qu’elle vous réserve ?
On devine bien que l’énergie et l’état d’esprit pour se rendre au travail ne sont pas tout à fait les mêmes entre les 3 premières options et les 2 suivantes. Pourtant on aura bien un collaborateur présent à son travail et a priori motivé. Mais on sent bien que la motivation est un peu plus laborieuse dans les premières réponses.
Qu’est-ce que la motivation ?
Avoir des collaborateurs motivés. Voilà une quête constante dans les entreprises, et il faut bien l’avouer, une quête assez peu fructueuse puisque de nombreuses études ne cessent de démontrer à quel point la motivation des salariés est en berne, quels que soient leurs postes et leurs statuts.
La lourde tâche de la motivation est aujourd’hui principalement confiée aux RH et aux managers. Ils sont sommés de trouver des candidats motivés pour le poste et l’entreprise. On met alors en place toute une marque employeur pour attirer les meilleurs candidats. Puis, ils doivent entretenir cette motivation en veillant à l’ambiance de travail, la juste rétribution, l’accès à la formation, l’équilibre vie pro/vie perso, la qualité du management etc…
Tout ça est globalement mis en place dans beaucoup d’organisations (avec plus ou moins de succès malheureusement), mais malgré les efforts, la motivation ne cesse de décroitre. Alors, que manque-t-il ? De la curiosité bien sûr ! On vous explique tout ça en détail dans quelques instants, mais revenons d’abord sur ce qu’est la motivation. Car finalement, on en parle constamment sans forcément bien en connaitre les mécanismes.
La motivation est un concept complexe faisant référence aux forces qui poussent une personne à agir d’une certaine manière ou à poursuivre un objectif spécifique. La motivation est ce qui stimule, dirige et maintient le comportement humain. Elle peut être influencée par divers facteurs et peut varier d’une personne à l’autre.
D’un point de vue neurologique, la motivation est générée par deux systèmes : celui de la récompense et celui de la punition. C’est, dans le langage courant, ce qu’on appelle la carotte et le bâton. Bernard Anselem et Emmanuelle Joseph-Dailly expliquent très bien ce fonctionnement dans leur livre les talents cachés de votre cerveau au travail. Concernant plus particulièrement le système de récompense, ils expliquent que ce dernier fonctionne par la recherche constante de la production d’un neurotransmetteur très addictif : la dopamine. « Ce système de récompense très puissant est à la base de tous nos comportements. Mais il a néanmoins un défaut important : il n’est jamais rassasié, il s’accoutume. Il lui en faut toujours plus, d’où de nombreuses frustrations et addictions ».
C’est par exemple ce phénomène qui nous pousse à chercher toujours plus de likes sur les réseaux sociaux ou à irrémédiablement replonger la main dans le bol de cacahuètes alors que la première poignée aurait largement déjà dû nous satisfaire… Mais c’est aussi le même phénomène qui nous pousse à aller chercher toujours plus de rémunération, de reconnaissance, d’avantages etc. sans jamais vraiment totalement nous satisfaire. Ça nous satisfait sur le coup, mais très vite, on a besoin de plus.
Ces motivations extrinsèques (qui dépendent d’éléments extérieurs à nous) ont donc des limites. La motivation intrinsèque (qui vient de nous) même si elle présente aussi des phénomènes d’accoutumance, permet cependant de garder une motivation bien plus durable.
La motivation intrinsèque émerge d’activités réalisées pour l’intérêt qu’elles présentent en elles-mêmes et pour la satisfaction et le plaisir qui en découlent. On parle alors d’autodétermination. Pour cela, il faut 3 éléments :
- La maîtrise de l’activité : j’ai la compétence nécessaire pour réaliser ma tâche
- L’autonomie : j’ai la marge de manœuvre nécessaire pour choisir comment réaliser ma tâche
- Le sens : je réalise cette tâche pour une cause qui me dépasse et qui vient servir des intérêts collectifs
« Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie. »
Confucius
Quand on sait cela, on n’est moins surpris de constater que de plus en plus de personnes quittent le salariat pour l’entrepreneuriat. Certes, on perd de nombreux avantages, moteurs de la motivation extrinsèque, mais on gagne très souvent sur les 3 éléments de l’autodétermination : sens, maitrise de l’activité et autonomie.
La bonne nouvelle, c’est que le salariat peut aussi permettre d’alimenter ces 3 points. Encore faut-il simplement les avoir à l’esprit et être prêt à lâcher du lest sur certaines choses, notamment sur la maitrise de l’activité et l’autonomie.
Prenons le contre-exemple du rétropédalage actuel sur le télétravail : il vient directement mettre à mal la dimension « autonomie » et peut aussi entamer celle du « sens » (notamment pour ceux qui ont beaucoup de temps de transport et qui voient cela comme un non-sens écologique et une perte de productivité). Tout ça contribue non seulement à ne pas alimenter la motivation intrinsèque, mais peut contribuer à démotiver. On en arrive à la troisième forme de motivation : l’amotivation, qui se définit comme l’absence de toutes motivations chez l’individu
Ces 3 formes de motivation sont issues des travaux de Ryan & Deci qui les présentent sous la forme d’un continuum
Si globalement, les facteurs de motivations intrinsèques sont questionnés en entretien d’embauche, toute la difficulté est de réussir à les maintenir dans le temps, au sein d’environnements souvent complexes et de contraintes continues qui peuvent entrainer perte de sens, perte de maitrise et perte d’autonomie.
« 13 ans, c’est, en moyenne, le temps qu’il faut aux chercheurs pour développer un nouveau médicament. Pourtant, bien qu’ils aient travaillé sur un nouveau traitement pendant plus d’une décennie, les chances que celui-ci soit autorisé sont en réalité, relativement faibles. Le plus grand obstacle est le taux d’échec ; les molécules formant un médicament à visée thérapeutique doivent remplir des critères spécifiques d’efficacité, de tolérance et de faisabilité. Dans le domaine de l’oncologie, d’autres obstacles se dressent sur la voie de la recherche et du développement, tels que la perpétuelle évolution des normes thérapeutiques. Tout cela signifie que les chercheurs effectuant des recherches pharmaceutiques doivent faire preuve d’une résistance élevée à la frustration et d’une force intérieure particulière qui préserve leur motivation à poursuivre leurs travaux. »
Dans cet exemple donné par Merck Group, on voit à quel point, c’est effectivement un réel challenge de réussir à maintenir la motivation des chercheurs dans le temps.
« Alors, comment nos chercheurs restent-ils motivés malgré ces processus laborieux et souvent infructueux ? Quelle est la motivation de nos chercheurs ? La réponse tient en un seul mot : curiosité. »
Merck Group a ainsi fait de la curiosité sa soft skill clé. Soft skill évaluée régulièrement au sein des équipes.
Voyons maintenant plus précisément en quoi la curiosité suscite et maintient la motivation.
Comment la curiosité alimente la motivation ?
Curiosité de soi
Connaissez-vous vos moteurs ? vos talents ? ce qui fait le plus sens pour vous ?
La plupart des gens ne les connaissent pas. Et ce n’est pas surprenant puisque les connaitre demande un travail introspectif de connaissance de soi encore trop peu encouragé dans notre culture. Or, ça devrait être un incontournable, notamment au moment de choisir ses études, son métier puis lors de changements d’entreprises ou reconversion.
Aujourd’hui, on confie souvent les clés de notre motivation aux autres et particulièrement à notre manager. Mais comment quelqu’un pourrait savoir quels bons leviers actionner alors que nous-mêmes ne les connaissons pas ? Selon nous, le manager n’a pas pour rôle de motiver son collaborateur. Il a pour rôle d’entretenir sa motivation. Ce qui est déjà pas mal. Mais encore une fois, faut-il qu’il sache de quoi chacun a prioritairement besoin pour maintenir sa motivation. Ça, il ne peut pas l’inventer. À défaut, soit il incarne parfaitement le manageur curieux et saura détecter quelques aspérités motivationnelles chez chacun de ses collaborateurs, soit, il va projeter les mêmes leviers motivationnels que lui. Il fera alors son possible pour les actionner, mais sans forcément de résultats. Ce qui n’aidera pas à motiver ses collaborateurs. Pire, ce qui pourra contribuer à démotiver le manager lui-même, car il se sentira démuni (perte du facteur « maitrise » dans les 3 éléments de l’autodétermination).
La curiosité de soi est donc une clé essentielle. Connaitre « son mode d’emploi », à quoi nous carburons est important. D’une part parce que ça nous rend plus autonomes et acteurs de notre motivation et d’autre part, parce que nous pouvons ensuite partager ce mode d’emploi aux autres si nous attendons d’eux qu’ils contribuent à alimenter correctement notre motivation.
Les forces motrices sont une clé intéressante pour débroussailler les différents facteurs motivationnels. 7 dimensions ont ainsi été définies :
Les talents sont aussi une clé de lecture précieuse. Un talent se reconnait à trois éléments. Quand on l’active,
- On obtient un haut niveau de performance
- On est soi-même
- Ça nous donne de l’énergie plutôt que de nous en coûter
Une compétence n’a que le premier élément. Pour l’exercer, cela demande plus d’efforts et donc ça nécessite de redoubler de motivation.
Connaitre ses moteurs et ses talents et pouvoir s’appuyer dessus au quotidien renforce la confiance en soi, le sentiment d’auto-efficacité et ce sentiment incroyable de faire exactement ce pour quoi nous sommes faits. Voilà de quoi générer une forte motivation intrinsèque.
Si en plus, on couple ça avec le sens, alors la motivation est extraordinaire. C’est l’une des raisons qui explique le succès croissant de l’Ikigai en entreprise. Au croisement de ses talents, de ce que la personne aime, de ce qui a du sens pour elle et de ce pour quoi elle peut être payée, l’Ikigai (=la raison de se lever le matin) donne des clés de compréhension de soi très forte. Quand il est réalisé en équipe, il permet aussi de mieux comprendre les autres. A l’échelle d’une organisation, cela apporte de nouvelles perspectives pour penser les évolutions internes. Une approche bien plus humaine et complète que la traditionnelle approche centrée uniquement sur les compétences.
Curiosité au monde
Imaginez, vous êtes dans une entreprise depuis plusieurs années. La routine a fini par prendre le dessus : vous faites le même trajet tous les jours, vous assistez aux mêmes réunions, vous parlez des mêmes sujets, vous envoyez des e-mails aux mêmes personnes, vous suivez les mêmes indicateurs, vous faites face globalement aux mêmes problématiques… Vous voyez aussi régulièrement arriver les nouveaux collaborateurs. Avec cette flamme que vous aviez, vous aussi, à vos débuts. Mais également avec les mêmes questions, les mêmes suggestions d’amélioration. Et vous y répondez de la même façon qu’on vous a répondu à l’époque : On a toujours fait comme ça et ça fonctionne assez bien finalement. Pourtant, vous n’êtes pas protégé des changements incessants et des nouveautés constantes, mais ce sont des choses qui vous agacent, qui vous font perdre du temps précieux. Bref, votre flamme intérieure a disparu depuis longtemps. Vous faites votre travail de façon professionnelle, mais votre énergie naturelle, votre motivation intrinsèque est en berne. Et pour quelle raison ? Parce que vous avez perdu votre curiosité.
Alors pour certains ces « plusieurs années » se comptent en décennies. Pour d’autres et notamment les jeunes générations, ce phénomène peut apparaitre au bout de quelques mois, mais quoi qu’il en soit, ce tableau ne donne pas envie. Malheureusement, il est représentatif du quotidien de très nombreux salariés. Démunie, l’entreprise fait son possible pour essayer de motiver, mais ne proposant que des leviers extrinsèques, ce n’est jamais assez. Il est alors urgent de permettre aux salariés de retrouver leur motivation. Et pour cela, rien de mieux que de les inviter à creuser ce qui éveille leur curiosité. Que ce soit au sein de l’entreprise, du secteur, du métier ou de tout autre chose, écoutez attentivement ce qui intéresse vos collaborateurs et laissez-les y accorder un peu de temps.
On connait les grandes démarches des entreprises (comme Google) qui allouent un pourcentage du temps de travail pour que les salariés puissent s’investir sur les sujets de leur choix. Sans aller jusque-là, on peut encourager la curiosité et ainsi développer la motivation intrinsèque en soutenant davantage ses salariés à :
- se rendre à des conférences et salons
- rencontrer des pairs dans des entreprises plus ou moins différentes de la sienne
- s’investir dans le projet de son choix, en cours dans l’entreprise
- initier un nouveau projet
- prendre des responsabilités complémentaires
- faire des formations
- etc…
Attention, il n’est pas question ici de contraindre à faire ces choses-là. Sinon, on touche à de la motivation extrinsèque (en l’occurrence plutôt le bâton de la carotte) et la curiosité ne sera pas forcément au rdv.
Beaucoup d’entreprises disent que leurs salariés ne sont pas assez curieux. Nous aurions plutôt tendance à penser que les entreprises ne laissent pas réellement la curiosité de leurs salariés s’exprimer. Dès que ces derniers veulent « sortir » de leur quotidien, investiguer sur des sujets un peu différents, on leur parle de perte de temps, de budgets etc… Bien sûr, ce sont de réels paramètres à prendre en compte. Mais si on met cela en face du coût de la démotivation, l’investissement semble bien dérisoire. Par la confiance et la liberté que vous leur donnerez, vous leur permettrez d’être curieux et d’alimenter les facteurs de l’autodétermination.
Curiosité de l’autre
Imaginez toujours que vous êtes salarié dans une entreprise depuis plusieurs années. Et depuis que vous êtes dans cette entreprise, les relations avec le service A, ont toujours été compliquées. On vous avait prévenu à votre arrivée. Et vous l’avez très vite éprouvé. Malheureusement, vous avez besoin du service A pour réaliser une partie de votre job. C’est une lutte quotidienne pour vous et vos collègues. Et cela pèse sur le moral et la motivation de tous.
Cette situation se retrouve plus ou moins dans la plupart des entreprises. Il y a toujours des entités qui s’opposent historiquement, qui ne se comprennent pas. C’est tellement ancré que ce problème central n’est même plus traité. C’est devenu une donnée avec laquelle il faut composer. Mais ça pèse énormément sur la motivation des collaborateurs. Chaque entité voit l’autre comme un service l’empêchant de bien effectuer son travail et incapable de comprendre ses contraintes et ses besoins. On ajoute à ça un sentiment terrible d’injustice, parce qu’on trouve que l’entreprise ne fait rien pour régler le problème tout en mettant une exigence forte sur la bonne réalisation du travail, et on obtient un cocktail destructeur de motivation.
Le sociologue François Dupuy évoque ce sujet à travers ses différents tomes de « lost in management » :« Dans le modèle segmenté et séquentiel, chacun fait “son” travail de son mieux et s’en trouve récompensé quand le travail est bien fait. La coopération vient compliquer la donne. Elle oblige les différentes briques opérationnelles et fonctionnelles – individus et services – à s’accorder sur un objectif collectif, qui deviendra l’étalon de toute évaluation. Cela introduit de l’interdépendance, une aptitude à la souplesse et donc de l’inconfort. »
Et voilà comment les besoins d’autonomie et de maitrise sont mis à mal dans le quotidien d’une très grande majorité de salariés. Encore une fois, pas étonnant que tant de personnes se lancent sur des métiers de freelance. Ils cherchent ainsi à retrouver autonomie et maitrise totale de leur périmètre d’activité.
En entreprise, il est alors urgent de rétablir la communication et pour cela rétablir de la curiosité d’un côté comme de l’autre. En effet, quand l’autre nous agace, quand on est convaincu qu’il ne fait aucun effort, qu’il n’écoute pas, voire qu’il nous met volontairement des bâtons dans les roues, on ne cherche plus à le comprendre, on le juge. On ne cherche plus à aller au-delà de ce qu’il laisse voir, on s’y accroche comme des preuves de sa mauvaise foi et/ou de ses comportements hors-jeu. Bref, on perd complètement en curiosité et on érige des murs plutôt que des ponts. L’accompagnement d’un tiers (RH ou coach externe) est alors souvent nécessaire pour créer un cadre d’échange neutre et constructif.
Vous l’avez compris, l’ensemble de l’entreprise, et notamment les managers et les RH ont bien sûr un rôle clé dans la motivation des salariés. Cependant, il est une soft skill dont on entend trop peu parler et qui est pourtant essentiel : savoir se motiver.
Et pour réunir la compétence « savoir motiver » et la soft skill « savoir se motiver », le terreau de la curiosité est indispensable 😉
Concrètement, comment faire ?
L’entreprise curieuse propose notamment une conférence pour prendre conscience de ces enjeux. À travers les ateliers, vos collaborateurs peuvent être accompagnés pour développer leur curiosité d’eux-mêmes et des autres afin de découvrir leurs moteurs motivationnels, leurs talents ou encore leur Ikigai. Découvrez notre offre.