Soyons agile !
Voilà une petite phrase qui s’est répandue depuis quelques années dans les entreprises. Et cela se comprend. Dans ce fameux monde VUCA (volatile, incertain, complexe et ambiguë), ce qui était vrai hier, ne l’est déjà peut être plus aujourd’hui et le sera vraisemblablement encore moins demain. Il est donc nécessaire de faire preuve d’agilité.
Mais au fond, qu’est-ce que cela signifie vraiment ? Et pour quelles raisons, cette petite phrase est devenue une incantation ou une injonction, plus qu’une réalité dans une grande majorité des organisations ?
Le Larousse définit l’agilité comme :
- Légèreté, souplesse dans les mouvements du corps
- Vivacité intellectuelle
L’agilité semble donc s’inscrire avant tout en opposition à la lenteur et la lourdeur.
Ces qualificatifs peu reluisants, dont on taxe les administrations et les très grosses entreprises, mais dont en réalité, même les petites structures n’y échappent pas vraiment…
C’est alors là que sont arrivées les start-up et les méthodes de travail agiles, issues initialement de l’univers IT. Leurs aisances à naviguer en eaux troubles a suscité beaucoup d’intérêt. Les entreprises ont compris qu’il y avait quelque chose à reproduire pour permettre aux plus grosses structures de retrouver de la souplesse et de l’adaptation dans leurs modes de fonctionnement. Jusque-là, tout cela semble parfaitement pertinent. Mais dans la réalité, alors que le Manifeste agile reposait sur des valeurs et un mindset spécifiques, la volonté de gagner en agilité dans les entreprises s’est traduite par :
- Avant tout, et malheureusement dès fois uniquement, la mise en place de méthodes agiles. Mais ce ne sont que des méthodes. Mal expliquées et/ou appropriées, et sans l’environnement adéquat, elles n’ont pas eu la puissance souhaitée
- Comprenant qu’au-delà des méthodes, c’était aussi et avant tout une culture et un état d’esprit, on s’est tourné vers les salariés en leur intimant l’ordre d’être plus agiles. Mais cette formule, si elle est privée d’un réel accompagnement, et si elle n’est envisagée que lorsque cela nous arrange, ne peut avoir que l’effet inverse : braquer les gens, les rendre encore moins ouverts et donc moins agiles…
- Résultats, ces injonctions sont devenues soit vides de sens pour beaucoup de salariés, soit facteurs de stress et d’épuisement pour les plus volontaires. Car comme le racontait Romain Gary : « Il y avait une fois un caméléon, on l’a mis sur du vert et il est devenu vert, on l’a mis sur du bleu et il est devenu bleu (…) et puis, on l’a mis sur un plaid écossais et le caméléon a éclaté » ». L’agilité à tout va, sans sens et sans accompagnement, n’est sans doute pas pour rien dans l’épidémie de burnout et de désengagement constaté depuis ces dernières années…
L’agilité est en réalité d’abord un état d’esprit. Jean-Claude Grosjean, dans son livre Culture Agile, insiste sur le fait que c’est d’abord une révolution culturelle : « S’éveiller à l’agilité, c’est donc opérer une véritable démarche de transformation, avant tout culturelle, pour diffuser la culture agile dans toute l’organisation et permettre à l’entreprise de s’adapter en permanence, de ravir le client au plus tôt et de garantir dans la durée l’expérience employée la plus aboutie. »
Et c’est alors là que la curiosité prend toute sa place. Gabrielle Halpern l’explique d’ailleurs très bien dans cet article en affirmant que la compétence de demain n’est pas l’agilité ou l’adaptabilité, mais avant tout la curiosité : https://www.magazine-decideurs.com/news/gabrielle-halpern-il-est-urgent-de-developper-l-hybridation-au-sein-des-entreprises
En effet, comment être agile sans être le préalable de la curiosité ?
Curieux de ce qui se passe dans le monde, sur notre marché, dans nos métiers etc… Si je suis curieux, je vois et je peux donc anticiper une vague du changement. Lorsqu’elle arrive, je ne suis donc pas surpris. Je m’y suis préparé. Je peux surfer dessus. Je peux même tellement bien la voir arriver, que je suis force de proposition et d’innovation dans mon entreprise. Bref, je suis agile.
Curieux des autres, de ce qu’ils font, de ce qu’ils pensent, de ce qu’ils ressentent. Si je suis curieux, l’autre n’est pas une menace, mais un centre d’intérêt. Si mon chef, un collègue ou encore un client me parle de quelque chose que je ne connais pas ou que je n’aime pas, ma curiosité me pousse à chercher à comprendre, à rester ouvert, plutôt qu’à me braquer.
Enfin, curieux de moi-même, de mes réflexions et de mes comportements. Si je suis curieux de moi, j’ai davantage conscience de mes angles morts. Je sais que je peux dès fois me braquer, rester camper sur mes positions. Mais je m’en sers désormais pour apprendre sur moi et retrouver de la flexibilité comportementale et cognitive.
Car finalement, le frein principal dans les organisations n’est pas la lourdeur ou encore la lenteur. Ce ne sont en général que des symptômes. Le frein principal, c’est la rigidité. La rigidité est un mécanisme de protection que nous avons tous : face à l’inconnu, à la menace, à la peur, nous nous rigidifions.
Lorsque nous sommes rigides, nous rejetons ce qu’on nous propose. Nous restons campés sur nos positions. Nous nous pétrifions. Face à cela, l’injonction à l’agilité a peu de prise. C’est donc en amont qu’il faut agir afin de limiter ces mécanismes de rigidité.
Mais soyons honnête et à l’aise sur le fait que ce sont des réflexes que nous avons tous. Même curieux, ça nous arrive encore bien sûr d’être rigides. Cependant, on en a plus vite conscience et on peut ainsi éviter de s’enfermer dans des postures de plus en plus rigides.
Vous l’aurez donc compris, si l’agilité est indéniablement une compétence indispensable, elle ne peut se résumer à des méthodes et émerger par la simple évocation de ce mot. L’enjeu est avant tout de passer au-delà des mécanismes de protection que chacun d’entre nous met en place et qui s’illustrent par de la rigidité dans nos comportements et façons de penser. Et pour combattre cela, rien de tel que la curiosité 😉
Concrètement, comment faire ?
L’entreprise curieuse propose notamment une conférence pour prendre conscience de ces enjeux. Dans le parcours de formation, vous retrouvez aussi un module consacré à nos mécanismes de rigidité et un autre pour développer sa flexibilité cognitive et comportementale. Découvrez notre offre.
Ping : pourquoi ce n'est pas si simple d'être curieux - L'Entreprise curieuse